Jean-Marie Favreau, Radio Campus Clermont-Ferrand, 2016—2017
Interface propose un cheminement sonore à la frontière entre sciences et techniques, un itinéraire non linéaire qui s'approche de quelques-unes des questions que l'on peut se poser quand on pratique la science.
Quel est le rôle de la technique dans le quotidien des scientifiques ? Est-ce que cette problématique est la même pour les gens de sciences dures et de sciences humaines ? Que signifie la technique pour un mathématicien ? Est-ce que les démarches exploratoires artistiques autour du rôle de la technique peuvent être transposées à la science ?
Qu'est-ce que la technique, pourquoi oublie-t-on ce mot au profit de la technologie ? Quelle est la différence entre technique et méthode ?
Les avancées de la connaissance nécessitent-elles une technique de pointe ? Qui fait avancer la technique ?
Taco Ekkel, Rijksmuseum library. CC-BY-SA-2.0. Source : flickr
spondooley, My 1963 first edition compact cassette recorder still works WORLDS FIRST COMPACT CASSETTE RECORDER with the 1967 first mini compact cassette recorder. CC-BY-SA-2.0. Source : flickr
Le média radio comme moyen de répondre de manière sonore aux questions posées, sans nécessairement choisir une démarche purement documentaire.
Partir avec son micro pour aller questionner les gens qui vivent la science, l'art ou la technique, écouter ce qu'ils disent, mais aussi tendre l'oreille aux sons des techniques qu'ils pratiquent.
S'interroger sur les positions des hommes et des femmes qui ont fait la science, et aller questionner des textes historiques. Écouter aussi autour, et proposer quelques éléments de la culture populaire — radiophonique, télévisuelle ou cinématographique — qui abordent les mêmes problématiques.
Ne pas avoir peur des silences, inviter l'auditeur à une écoute active.
Qu'est-ce que la technique, du point de vue d'un chercheur à l'aurore du XXIe siècle ? A-t-on besoin de technique aujourd'hui pour faire avancer la recherche scientifique ? À partir de ces premières questions simples, cette première variation d'interface part à la rencontre de scientifiques, au cœur de leurs laboratoires, pour répondre de manière pratique à ces questions.
Le long de ce cheminement, on rencontre des chercheurs dont les disciplines nécessitent d'observer la matière, qu'elle soit vivante ou solide. Dans ces pratiques, la technique est essentielle.
On se pose alors la question de la manière dont les explorations des scientifiques sortent des laboratoires, et l'on constate que la technique est là aussi un vecteur essentiel, même s'il n'est pas le seul pont qui existe entre les deux univers.
Enfin, on s'interroge sur le rôle de la recherche comme moteur de nouvelles innovations techniques. En observant deux exemples — l'électrophysiologie et l'aventure du CERN — on constate que les besoins des scientifiques peuvent être à l'origine de découvertes et d'avancées techniques au delà des frontières thématiques initiales de ces activités de recherche.
Greg Emmerich, Tubes. CC-BY-SA-2.0. Source : flickr
Pour réaliser cette première variation, je me suis rendu à l'INRA Clermont pour rencontrer Sophie Bouchet (chercheur), Charles Poncet (ingénieur de recherche, responsable de la plateforme de séquençage), Pierre Barret (ingénieur de recherche, responsable de la plateforme valorisation fonctionnelle), et Anne Partier (technicienne sur la plateforme valorisation fonctionnelle). J'ai rencontré Nicolas Batisse (maître de conférences) à l'Institut de Chimie de Clermont-Ferrand.
Frédéric Poignant (directeur du GIP Innovergne, coordinateur de la maison Innovergne) a présenté les problématiques de transfert, et Cyrille Damez (directeur technique, responsable Recherche et développement, Allegorithmics) a témoigné sa pratique de l'innovation côté entreprise.
Enfin, Jérôme Coste (électrophysiologiste, CHU de Clermont-Ferrand, service de Neurochirurgie) a parlé de l'innovation pour la neurochirurgie, et François Vazeille (chercheur CNRS, rattaché au laboratoire de physique corpusculaire) a présenté l'aventure du CERN.
Global Panorama, Green Architecture. CC-BY-SA-2.0. Source : flickr
Dans la première variation, nous nous sommes intéressés à explorer la place de la technique dans les pratiques scientifiques proches des sciences de l'ingénieur. Cependant, qu'en est-il pour des disciplines qui n'ont pas pour cheminement naturel d'aboutir à des innovations techniques ?
Dans cette deuxième variation, on s'interroge sur la place de la technique dans les pratiques des sciences les plus abstraites, telles que les mathématiques et l'informatique théorique. Que signifie technique dans ce contexte particulier ? Les techniques de preuve se transmettent-elles comme les techniques artisanales ?
Dans une autre direction, celles des sciences humaines, on peut aussi s'interroger sur la définition de la technique, et sur la place qu'elle occupe dans leurs quotidiens de chercheurs. On se pose aussi la question de la proximité entre technique et méthode dans ces pratiques scientifiques.
Pour réaliser cette première variation, j'ai rencontré Adrien Richard (chargé de recherche CNRS au laboratoire I3S, Sophia Antipolis) aux journées nationales du GDR IM. J'ai ensuite rendu visite à Dominique Manchon (chargé de recherche CNRS) dans son bureau du laboratoire de mathématiques de l'Université Clermont Auvergne.
C'est au bar le Carnot que j'ai pu discuter avec Dana Martin (maître de conférences en études germaniques, laboratoire communication et solidarité à l'Université Clermont Auvergne).
Enfin, j'ai rencontré Magali Ginet (professeur des universités) dans son bureau du laboratoire CNRS LAPSCO, Université Clermont Auvergne
La démarche du scientifique peut facilement être assimilable à celle de l'artiste, dont l'objectif est d'explorer de nouvelles aires de connaissances, en proposant des réponses originales à des questions nouvelles. Tant pour le scientifique que pour l'artiste, la place de la création est centrale. Dans les deux cas, ces démarches sont souvent dépendantes des possibilités offertes par la technique.
Comment les artistes ont-ils interrogé et exploré les contraintes et possibilités offertes par la technique ? Ont-ils trouvé des moyens de s'en affranchir ? Après avoir tenté de répondre à ces questions, nous reviendrons aux pratiques scientifiques en projetant dans cet espace de création les propositions offertes par les pratiques artistiques.
Variation prévue prochainement.
Isabell Schulz, Tate Modern London. CC-BY-SA-2.0. Source : flickr